Fallait il refuser les tests ? #1

Ancien billet que je remonte car je le trouve tout à fait d'actualité...

Hier ma 6ème était convoquée au rectorat de Rennes pour passer une série de tests écrits dans le cadre du contrôle annuel de l'inspection. Ce n'est qu'une première étape ; viendra en juin l'entretien avec deux inspecteurs du doux nom d'IPR. 
S'il est évident que ce type de contrôle est totalement inadapté à l'IEF, il n'en est pas pour autant, à mes yeux, scandaleux au point de les refuser et de se mettre en porte-à-faux avec la loi et à mal avec l'IEN .


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Pourquoi est ce inadapté ? Simplement parce que la loi m'oblige à faire atteindre à mes enfants le socle commun des connaissances à l'issue de la scolarité obligatoire. Autrement dit, mes enfants doivent avoir le même niveau officiel (nan...parce qu'en réalité, le socle n'est pas atteint par tous les scolarisés...!) à 16 ans mais sans être pour autant tenu- au nom de la liberté pédagogique garantie et dernièrement réaffirmée par l'EN (mais si !)- de suivre le programme de l'EN par niveau. Je ne suis pas non plus tenue de suivre le même calendrier hebdomadaire, mensuel, ou annuel. Si bien que ces tests sont inadéquats : on peut tester votre enfant sur des connaissances que l'EN estime être du niveau de 6ème mais que vous n'êtes absolument pas tenu d'avoir vues à l'instant T...

Fallait il les refuser ? A mes yeux, non. 
Pour une première raison : n'ayant pas connu ce type de contrôle auparavant, il fallait bien les faire une fois pour voir de quoi il retourne. Je ne vais pas crier avant d'avoir mal ! 
La deuxième raison est que les tests prévus pour deux heures ont été finis par les enfants en 1 heure, 1h15...pas de quoi en faire un fromage ! 
La troisième raison est que les enfants en IEF sont en tout et pour tout (IEF et CPC confondus) : 52 en primaire, contrôlés à leur domicile, et 17 collège + lycée contrôlés à Rennes. Autant dire qu'on ne pèse pas bien lourd ! 
La quatrième raison est que franchement les questions posées n'étaient pas difficiles. Pas de quoi fouetter un chat ! De plus les personnes de l'EN rencontrées sur place étaient toutes plus charmantes les unes que les autres.
Cette opposition systématique si ce n'est idéologique aux tests m'agace. 
D'abord, pour moi, l'argument de l'illégalité ne tient pas. Les textes de loi ne permettent pas d'affirmer que les tests sont illégaux. L'inspecteur doit contrôler que l'enfant reçoit bien une instruction conforme à son âge et à son état de santé. Le test est une modalité parmi d'autres. Elle n'est pas adaptée mais elle n'est pas illégale. Ensuite cette confrontation aura, selon moi, un effet pervers : elle ne protégera pas nos droits mais finira par nous en priver. A force d'échauffer l'EN, elle va finir par durcir durablement le ton. 
Nous avons dans notre pays, cet énorme privilège-que nous ne voyons plus- de pouvoir instruire nous-mêmes nos enfants avec, somme toute, beaucoup de liberté et nous ne sommes pas si nombreux en Europe...! Croyez-vous qu'ils vont s'embarrasser longtemps de contestataires pour une poignée  de familles  (rappel 17 en Ille et Vilaine) ?

En réalité, ces tests gênent essentiellement les familles qui optent pour des apprentissages autonomes ou totalement informels, peu compréhensibles pour l'EN et pour beaucoup d'entre nous, disons le. Je n'ai pas cru au bénéfice de ce type d'apprentissages, j'ai bien essayé et n'y crois toujours pas. Je crois au juste milieu, à la croisée des chemins. Dans l'informel comme dans le reste, il ne faut pas tout prendre ni tout rejeter.

Les programmes de l'EN sont-ils si nocifs qu'il faille s'en éloigner au point de ne pas pouvoir répondre une fois par an à quelques questions ? Les programmes ne sont en réalité pas si mauvais, l'enjeu est bien plus dans la façon de les transmettre et le rythme adopté. S'éloigner de manière trop marquée des programmes par niveau présente un risque: si pour un cas de force majeure, l'enfant devait reprendre le chemin de l'école...comment ferait-il ? Nous avons une responsabilité vis à vis de nos enfants. Que se passerait-il pour un enfant qui à 12 ans ne sait pas lire parce qu'il n'avait pas envie d'apprendre ?

Bien entendu, à la marge, il y aura toujours des inspecteurs réfractaires, des contrôles à charge et des gens de mauvaise foi...malheureusement ! Ce n'est en réalité pas la majorité des cas.

Fallait-il que je refuse ces tests ? Avec un entretien le 10 juin? Le moins que l'on puisse dire c'est qu'ils ne sont pas très inquiets du niveau qu'ils vont trouver ! Vont-ils proposer un deuxième contrôle entre le 11 et le 30 juin ? Dans l'été? En septembre ??
J'accepte les tests parce qu'ils sont légaux et qu'une fois par an pour une année de totale liberté...ce n'est pas la mer à boire !
Il est regrettable que les inspections ne privilégient pas le contrôle en situation c'est à dire à la maison, avec les supports de l'enfant. 

La dame qui accueillait les enfants hier m'a expliqué qu'à l'école aussi, les enfants étaient évalués par leur professeur à la fin de l'année..." bien sûr madame, mais que se passe-t-il si les enfants ne réussissent pas leurs évaluations? On les retire de la classe ? On vient voir l'enseignant et on lui dit vous avez mal fait votre travail, on vous retire votre classe et placer vos élèves dans une autre classe?" 
Ce fût ma réponse à cette charmante dame qui n'a pas su quoi me répondre....


Pour aller plus loin dans votre réflexion

Commentaires

Anonyme a dit…
100 °/° d'accord avec toi sur ce sujet !
Armelle
Sab a dit…
Evidemment,tu te doutes que je partage ce point de vue...
Anonyme a dit…
Bonsoir Laurence,
Je comprends vos arguments et je me demandais juste comment votre écolière a ressenti les choses.
Au-delà de la question de la légalité des tests, il me semble que tous les parents ne sont pas capables de prendre en charge l'instruction de leurs enfants. Cela implique à mon sens d'avoir des connaissances solides, une sacrée dose de courage, d'abnégation et d'organisation. Jusque-là, nous avons mis en place une organisation à la carte pour notre garçon en pratiquant un peu des deux (école et IEF). je constate qu'il y a du bon des deux côtés. Pour nous, le plus difficile à la maison est de lui donner un rythme régulier. Les centres d'intérêts sont tels, qu'il a fallu que nous, parents nous disciplinions. Le petit est quant à lui très flexible mais il progresse beaucoup plus vite en IEF et trouve qu'avec papa ou maman, "on fait beaucoup plus de trucs intéressants". Il attend toujours avec une grande impatience, 16H30 et le retour dans la résidence des enfants scolarisés à l'école pour aller jouer avec eux.
Merci une fois de plus de prendre le temps de partager votre expérience !
Anne
sandrine a dit…
Laurence,

Non, je ne pense pas non plus qu'il faille refuser les contrôles. Si les personnes qui font passer ces tests sont polies, aimables même, et ne portent aucun jugement sur votre choix d'instruire vos enfants. Le respect de part et d'autre doit présider à toutes relations avec L'EN. Cependant, je comprends les parents exaspérés par les exigences que l'EN à envers eux et qu'elle n'a pas envers ses propres professeurs.
En tout cas, vu votre sérieux dans votre démarche d'IEF,je suis persuadée que vos enfants auront parfaitement réussi ces fameux tests. De plus, quand on sait que l'on ne note plus la dictée du BEPC au nombre de fautes commises mais aux mots correctement orthographiés, on se dit que les examens de l'EN n'ont d'examens que le nom!
Anonyme a dit…
bonjour Laurence. Je en fais pas l'IEF (pas encore en tout cas) mais c'est bon à lire. il est vrai qu'on a encore cette immense liberté en France ce qui n'est pas le cas en Italie (nous sommes une famille binationale) où l'école est obligatoire. Bonne continuation à vous. Je pensais que c'était l'inspecteur qui se déplaçait dans la famille pour le contrôle? En tout cas c'était le cas pour une amie qui fait IEF en Vendée…
zwahlen a dit…
Je trouve intéressant ton point de vue que je partage à 100%...Je pense important de garder la ligne rouge selon les objectifs du pays et voir les autorités comme des partenaires.

De mon côté, pas de tests, ni d'évaluations pour le moment...je nage dans un océan car je ne sais pas du tout qu'elles sont les objectifs...je le regrette car je ne comprends rien au blabla scolaire.

Mathilde a dit…
J'ai beaucoup aimé ton article ! Nous avons été contrôlée pour notre aînée aujourd'hui, elle a fait des tests de fin de CP, nous suivons un enseignement quotidien, il n'y avait aucune raison de refuser . Et dans l'ensemble, tout s'est très bien passé avec une belle conclusion sur nos filles, sur le travail de la plus grande et leur cadre de vie . Avant ce contrôle j'avais lu tellement d'horreur de personnes en " rebellions " que j'angoissais tout de même . Entre le contrôle de cette après-midi et cet article - que j'aurais du lire avant ;) - je suis vraiment rassurée et contente de nos choix .
Unknown a dit…
Les inspecteurs qui "inspectent" nos façons de faire sont les mêmes que ceux qui inspectent les professeurs en classe. Or le profs en classe ont toujours un retour avec leurs points forts et les points à améliorer. Car on peut toujours s'améliorer. Pour un parent en IEF qui n'est pas rompu avec les méthodes des inspecteurs, je crois que les points à améliorer sont perçus comme un reproche découlant directement de leurs choix. Combien de fois les inspecteurs m'ont dit: rassurez-vous, je dis exactement la même chose aux profs en classe! Il m'est arrivé d'être inspecteur pour le collège-lycée par un inspecteur qui avait inspecté mon mari! C'était plutôt amusant au fond: il avait un portrait assez complet de la famille!
Les tests demeureront toujours assez "injustes" car ne reflétant pas assez l'approche de l'IEF... Mais les approches en IEF sont si diverses, la tâche pour l'EN serait immense s'il fallait s'ajuster à tout un chacun. Je pense que ces inspections sont nécessaires (bien que je ne les aime pas plus qu'il faut!) afin de s'assurer que tous les enfants reçoivent réellement une instruction.
Ahelya a dit…
Le problème c'est que ces tests ont valeur de sanction en cas d'échec alors que nous n'avons aucune obligation de résultat mais de d'enseignement.
L'EN n'est elle-même pas sanctionnée et pourtant question échec, elle est la championne toutes catégories.

Ces tests ne gênent pas seulement les unschoolers mais surtout les familles en CPC qui se les voient imposer alors que leurs enfants sont déjà évalués tout au long de l'année pour le cours payant.
Depuis quelques années un amalgame est fait entre tous les statuts de l'enseignement à domicile.

Ces tests sont inadaptés puisque élaborés en fonctions des standards de l'EN (qu'elle n'atteint pas elle-même mais impose à ceux qui l'ont fuie) et non du projet pédagogique de la famille ou du CPC.
Même leur note de service prévoit que le contrôle soit réalisé en fonction des choix de la famille...hum hum.

Des questions, une discussion avec l'enfant en présence des parents, oui.
Plancher durant des heures dès le CP comme lors d'un examen hors de question.

Les enfants n'ont pas à être testés, mais l'instruction prodiguée vérifiée et c'est ce que prévoit la loi.
En effet, leurs évaluations écrites ne sont pas illégales (quoique), elles peuvent être proposées mais sûrement pas imposées et ne sauraient constituer à elles seules un contrôle de l'instruction. Elles ne représentent qu'un instant "photographié" de l'année de l'enfant en cours d'acquisition du socle commun à atteindre à 16 ans.
Comment juger ce que l'enfant est en train d'apprendre, a peut-être besoin de plus de temps pour assimiler?
Savoir où il est en, absolument, constater une progression également, c'est même salutaire mais pas des tests standardisés.
Tests d'ailleurs que leurs propres élèves ne sauraient réussir...

Aucun inspecteur n'interroge durant deux heures les élèves de l'enseignant qu'il inspecte tous les cinq ans...Aucun!
Le seul examen sur table intervient en fin de collège et non chaque année, non pas au rectorat ni a la DSDEN, mais dans un cadre que l'enfant connaît: son établissement.

Que cela ne vous dérange pas, vous convienne, vous arrange, certes, c'est votre vision des choses, tout a fait respectable.
Mais concevez qu'il puisse en être tout autrement pour d'autres pour des raisons aussi valables que les vôtres, sans pour autant être dans l'erreur tel que vous l'avancez ici et taxés de surcroît de risque pour les droits à l'IEF.
Ahelya a dit…
Désolé pour les fautes, correcteur automatique...
Laurence a dit…
@Alheya : il m'a été reproché il y a quelques temps de ne pas vous avoir répondu. Je vais donc le faire rapidement aujourd'hui (vive les vacances !). Les tests ne sont pas adaptés dites vous? Je n'ai pas dit autre chose !
Les tests tels que vous les décrivez existent mais vous faites de cas particuliers une généralité. Tous les inspecteurs ne procèdent pas à des tests standardisés. Tous les inspecteurs ne se contentent pas des résultats de ces tests pour évaluer la qualité de l'instruction mise en place. Heureusement!
Ce que vous dénoncez ici, est le sens même et l'intérêt de l'évaluation quelle qu'elle soit. IL s'agit d'un débat presque philosophique.
Je conçois parfaitement que d'autres familles aient une autre vision des choses que la mienne. Je maintiens cependant ma position quand à leur responsabilité dans la modification de nos droits. L'actualité me donne d'ailleurs raison...En effet trop de familles refusent catégoriquement la moindre question, la moindre trace écrite, sont tombées dans un radicalisme préjudiciable. Nous le savons tous! C'est un secret de polichinelle ! Ceux qui contestent ce fait sont simplement de mauvaise foi, voilà ce que je pense. Et je continuerai, quoiqu'il advienne à dire haut et fort ce que je pense.