Pourquoi j'ai aboli la dictée



Pendant des années, je me suis cramponnée à cette idée : la dictée, exercice indispensable pour progresser en orthographe...
Mes 3 aînés étaient inégaux devant l'orthographe. Pour un cela allait presque tout seul, pour les deux autres, il leur a fallu, notamment pour Guyonne, une persévérance et des efforts soutenus pendant tant d'années ! Des listes de mots à apprendre, des tonnes d'exercices d'entrainement, des dictées tous les jours pendant 6 ans, des corrections à recopier...Les résultats ont ils été à la hauteur de leurs efforts ? A l'évidence, NON ! Les difficultés se sont atténuées mais perdurent car en réalité l'évolution de leur orthographe n'a rien à voir avec les dictées ! 

L'expérience et l'observation m'ont amenée aux constats suivants : 
- l'acquisition de l'orthographe est tout d'abord très variable en fonction des enfants
- un enfant peut être bon lecteur et avoir une mauvaise maîtrise de l'orthographe
- il est en réalité prématuré de faire faire à un enfant une dictée alors qu'il ne maîtrise pas pleinement les règles de grammaire et de conjugaison.
- bien souvent, la dictée permet surtout de mémoriser ses fautes...
- une dictée mobilise beaucoup de compétences, supposant donc une réelle maturité de l'enfant
- l'orthographe de nombreux mots ne s'explique par aucune règle par conséquent l'enfant ne saura l'écrire convenablement qu'une fois qu'il aura lu, vu, écrit ce mot de nombreuses fois. Le temps est donc le préalable essentiel. Le temps de parler, le temps de lire, le temps de faire de la copie.
- le regard positif et plein de confiance que l'on porte à l'enfant est fondamental pour son orthographe future. Plus on s'inquiète, plus il souffre car il voit bien qu'il doit redoubler d'efforts pour nous faire plaisir et qu'il n'y parvient cependant pas.

Qu'ai-je décidé de faire pour l'orthographe de mes poulets ?
- Leur faire confiance
- Leur donner toutes les occasions de lire, lire, lire quelle que soit la matière.
- Provoquer les occasions d'écrire, écrire, écrire quelle que soit la matière (résumés de leçons, légendes de croquis, lapbooks, préparations d'exposés etc...)
- Par conséquent laisser une large place au transversal. On fait de l'orthographe tout le temps ! Pas seulement le temps d'une dictée. J'ai vu tellement d'enfants capables d'écrire une dictée sans faute mais incapables d'écrire un texte de 5 lignes sans fautes ! Or, dans la vraie vie, on rédige des textes, on ne fait pas de dictées !
- Supprimer l'usage de fiches de travail à remplir. Boucher des trous ne favorise pas la compréhension globale d'une phrase donc la bonne orthographe. Les enfants font moins d'exercices, mais ils les copient.
- Favoriser les exercices d'écriture inventée (rédaction, courrier, journal etc...). Leur donner le goût d'écrire et donc d'être lus et compris. Ce qui sous-entend la maîtrise de l'orthographe qui va s’acquérir peu à peu en travaillant la correction des brouillons. Le travail d'écriture d'invention suppose en préalable, une communication orale soignée (de ma part en premier lieu) pour enrichir le vocabulaire, structurer la pensée. En effet la lecture de l'enfant est facilitée si son registre de vocabulaire est étendu : il connait la plupart des mots qu'il rencontre dans un texte. De même il écrira en utilisant les mots qu'il connait et qu'il utilise oralement.
Favoriser l'expression orale : exposés, répondre à des questions orales de compréhension, compte-rendu de recherches etc...
- Privilégier les exercices de copie
- Travailler l'étude de la langue avec un bon manuel et des exercices variés : à l'oral, à l'écrit, avec du matériel, en mouvement, en action etc...Ainsi chacun puise, comprend, mémorise en fonction de lui et de sa mémoire.

Peu à peu l'orthographe se mettra en place, lentement mais sûrement

Commentaires

Julie a dit…
Avez vous essayé la PNL ?
En très rapide il faut observer en haut à gauche la forme et les particularités d un mot , puis le visualiser au même endroit , L écrire et en regardant en bas à droite ressentir si ce qu on a écrit semble juste (cf apprendre à apprendre avec la pnl )
Unknown a dit…
Oui oui oui
Quel sujet , l'orthographe ...
Je suis souvent en désaccord avec ceux qui en parlent car souvent nous n'entendons que le voix de ceux qui ne veulent plus en faire sous prétexte que la dictée est inutile ou ceux qui veulent faire des dictées absolument puisqu'il faut bien travailler l'orthographe . Pour ces gens en général il n'y a qu'une manière de travailler l'orthographe , la dictée.
Je pense en effet que la dictée ne sert à rien mais a des effets dévastateurs chez certains élèves . Personnellement , j'ai été bien écœurée de l'écriture avec cet exercice ingrat . En première , je faisais des dissertations les plus courtes que je pouvais pour avoir moins "de risques orthographiques " .
Je détestais me relire ... Encore aujourd'hui , écrire me coûte à cause de ce que j'appelle "la honte orthographique " et pourtant j'en ai fait des dictées .
Avant d'apprendre l'orthographe il faut apprendre le plaisir d'écrire, le reste suivra et je me dis qu'il vaut mieux un enfant qui écrit avec des erreurs qu'un enfant qui n'écrit pas or la dictée génère parfois des enfants puis des adultes qui évitent d'écrire.
Comme tu l'as écrit l'orthographe se travaille de nombreuses manières , il faut du temps , de la persévérance et de la confiance.
À bientôt
Domitille la semeuse de coquilles orthographiques complexée par des années de dictées
Eric a dit…
Très belles observations et questions qui permettent à chacun de nous de se poser les bonnes questions.

Chez nous, la dictée est muette, selon la méthode Montessori. Cela ne fonctionne pas de la même façon pour nos deux enfants et il est vrai que la légitimité de cette pratique se pose.

Merci pour toutes ces pistes de réflexion qui ne manqueront pas de servir à beaucoup de parents.
Magali a dit…
Merci, c'est exactement ce que j'avais besoin de lire en ce moment ! Benjamin progresse si peu en orthographe...
Je vais lui faire faire de la copie en plus des travaux d'écriture libre :-)
Elsa a dit…
Ça me fait très plaisir de lire ça !!
Ça me dérange aussi... d'un certain point de vue...

En tant qu'élève j'ai été nulle (oui, oui !) en orthographe jusqu'à la moitié de la 4e. Ce qui mettait les adultes très mal à l'aise, car le discours de l'époque, c'était : "Oh, si elle/il lit, elle/il sera bon en orthographe !".

OK. Je passais mes JOURNÉES à lire. En même une partie de mes nuits - déjà ! Je lisais même en classe - chuuut ! ;-)

Mais j'étais nulle en orthographe. NULLE. Abonnée aux Zéros. J'avais un prof très rigoureux, qui me faisait recopier, répéter, réciter... NULLE, je vous dis ! :-D

Et soudain, je suis passé du 0 trèèès mûr (heureusement qu'on n'avait pas de notes négatives !!) à un 14. D'un coup. Un vrai 14, celui-là. Tout s'était mis en place dans ma tête d'un coup. Et je n'ai jamais cessé de progresser.

Aujourd'hui ?? Je crois que je fais moins d'erreurs que la plupart des gens de mon âge, mais bon, je continue de travailler... avec joie et curiosité, parce qu'un sentiment de compétence très fort m'annime. :-)

Je fus nulle, mais à présent, l'orthographe, j'adore !!

Ce que j'en retire pour mes enfants et mes élèves !??

;-)

P.S. Pardonnez les erreurs (non, on ne parle plus de "fautes" !) dans ce commentaires, c'est sûr : il y en a, mais : j'y travaille avec plaisir !)
Merci pour l'apport de tous vos commentaires qui enrichissent réellement les billets postés au poulailler.
Ici aussi, Eric, nous utilisons les dictées muettes mais c'est un exercice très différent de la dictée, il vient plutôt en prolongement de la lecture, il est ludique et vécu par les enfants comme un jeu d'écriture spontanée ; l'enfant s'amuse à écrire des mots qu'il connait et il est heureux d'y parvenir et de pouvoir les lire ou les faire lire ensuite. De plus c'est un exercice que mes poulets abandonnent en milieu de CE1, la logique EN voudrait que les dictées traditionnelles prennent le relais...
cendrillon a dit…
bonjour,

LA dictée! Quel exercice difficile pour les enfants. Sur mes 5 enfants, un seul ne fait quasiment pas de fautes malgré sa dyslexie et dysorthographie! Peut être est ce dû à sa maîtresse du CP CE1 qui ne se focalisait pas dessus. Mais utilisait toutes sortes de supports et moyens pour que les enfants mémorisent. Elle a réussi à lui donner le goût à écrire, lire. Mais à l'entrée du collège, très vite cet envie est parti (vers la 4ème). Pourquoi? Parce que c'était trop scolaire, noté et les lectures cursives mal faites. Il ne le voyait que comme une contrainte. Il passe son bac, fait encore quelques fautes dû à ses dys, n'écrit que par obligation scolaire et ne lit quasiment plus de livres. Voilà ce que l'EN laisse aux enfants! Alors que petit, on se régalait tous les deux à aller à la bibliothèque, lire le même livre....
Quant aux 4 autres, la maîtresse était différente et je peux vous dire qu'ils n'aiment pas lire, ni écrire et que les fautes c'est l'horreur. MAis je ne me focalise plus dessus.
Un peu comme les multiplications, je ne me suis jamais prise la tête avec malgré que les maitresses les punissaient quand ils ne les savaient pas. Je refusais les punitions. Et maintenant, ils sont lycée et fin collège et ils les savent. Donc....

bonne journée et bon travail
Crécerelle a dit…
Bonjour,
Je me retrouve personnellement pleinement dans votre article et dans le commentaire d'Elsa! Nulle en orthographe, pourtant, qu'est-ce que je lisais!! Mon mari me corrige encore aujourd'hui et il n'a jamais lu que les livres imposés et des BD!! De plus, je sais repérer les fautes de français chez les autres mais pas chez moi!!
camille a dit…
ca me fait pensé à Caro tu te souviens la pauvre cumulait les 0 pointés en bts.... ca ne l'empeche pas de reussir sa vie aujourd'hui mais quelle souffrance!!!
pour ma part, je fais faire une petite dictee par jour à mes élèves mais avec un theme travaillé chaque semaine donc un champ lexical étudié, et chaque jour nous travaillons du coup les accords ds le Gn et les accords sujet/verbe, la conjugaison... en fait je lis, puis dicte la dictée en attirant l'attention des enfants pendant la dictée sur les questions à se poser pour faire les bons accords... puis nous corrigeons aussitôt au tableau. seule la dictée finale du vendredi est notée . et j'indique aussi si les erreurs sont plutot des erreurs d'accords, d'homonymes ou d'orthographe pur pour guider les enfants dans leur travail. je trouve que les enfants progressent et ils réclament la dictée quotidienne comme le calcul mental. Aujourd'hui nous avons fait autre chose pour travailler les homophones nous avons inventé des phrases remplies d'homophones grammaticaux et les enfants ont bien ri...le jeu fonctionne bien pour apprendre!!!
merci pour ces pistes de reflexions LO
Lysalys a dit…
Ah tiens cheminement inverse. :)
Avec le souvenir de dictées imposées à mes frères collectionnant les zéros et la totale inutilité pour ceux-ci (ah si perte de confiance en eux), mais également la constatation des soucis orthos de mes filles, j'ai tenté 0 dictée et exos ciblés et surtout beaucoup de propositions d'écriture libre. Progrès lents... Au final j'ai réutilisé des dictées mais uniquement à l'adolescence, dictées jamais imposées et avec des textes intéressants à raison d'une proposition mensuelle. Je vais tâcher d'écrire un article aujourd'hui si possible sur la manière dont nous travaillons l'orthographe. :)
Anonyme a dit…
Bonsoir Laurence,
Quels sont les livres sélectionnés pour l'étude de la langue française ?
A quel âge commences-tu à les utiliser ? Existe-t-il des jeux ou des supports particuliers pour intéresser les enfants à une matière aussi aride ?
Merci,
Anne